On a clairement un déficit de qualité, et j'ai très peur que les seuls changements dans le dispositif ne soient pas suffisants. Morel est fantomatique derrière, mais en début de saison c'était aussi le cas de Le Goff. Je préfère le second au premier, vu son apport offensif non négligeable, mais force est de constater qu'on n'a aucune solution fiable à ce poste.
Dans l'axe, on n'arrive pas du tout à trouver l'équilibre entre apport défensif et créativité. Quand on bétonne, on ne propose rien, quand on cherche à jouer, notre milieu est une passoire. J'aimerais bien voir un axe Chalobah-Le Fée ou Abergel-Le Fée pour l'abattage, et peut-être Boisgard en 10 (sans doute moins transparent défensivement que Marveaux), mais on n'a aucune garantie que ça tiendra la route derrière, même si on peut au moins espérer voir autre chose que de longs ballons.
Sur les ailes, pas beaucoup de solutions hélas. Laurienté offre du punch et de la vitesse, mais il ne faudra pas longtemps à nos adversaires pour comprendre comment le cadrer. Lille n'a pas eu trop de mal, et vu notre jeu stéréotypé, c'est encore plus facile. Wissa n'est plus dangereux car il tombe sur des latéraux capables de tenir la route physiquement. Lui aussi évolue dans un registre trop stéréotypé, et n'apporte aucune variété. Si au moins il pouvait délivrer quelques centres du gauche de temps à autre...
Peu importe qui on aligne finalement, le problème vient de l'animation, et à ce niveau il est inquiétant qu'on ne l'ait pas corrigé plus tôt. Nos premières relances doivent impérativement passer par le milieu, avec des jeux de décrochage-remise de la part des milieux pour casser le pressing adverse. Des échanges Laporte-Le Fée-Gravillon en triangle devraient largement suffire à fatiguer un attaquant, si tant est qu'on soit capables de jouer des ballons dans les pieds. Nos ailiers n'ont aucune raison de prendre la profondeur avant qu'un travail de sape ait été effectué (c'est vraiment la base de toute animation collective), et ils devraient au contraire redescendre pour participer à la construction, offrir des solutions au porteur de balle pour éliminer les milieux adverses en étirant le jeu sur la largeur. S'ils décrochaient de temps à autre, on pourrait avoir des triangles Morel-Le Fée-Wissa, ou Mendes-Abergel-Laurienté, qui permettraient d'espérer poser un peu le pied sur le ballon en densifiant le milieu sur toute la largeur du terrain, et non en venant embouteiller l'axe, avec des meneurs de jeu qui auraient la latitude de décider quand réorienter le ballon vers l'autre aile une fois que l'adversaire s'est suffisamment engagé d'un côté, un peu comme au tennis. Dans un système à deux pointes (et c'est aussi valable dans un système avec un 10), un des deux joueurs offensifs doit ensuite décrocher pour servir de point d'appui et former un dernier triangle, par exemple Le Fée-Hamel-Wissa ou Le Fée-Grbic-Laurienté. Celui qui décroche crée, par aspiration, un décalage dans la défense adverse si le défenseur central le suit, ce qui libère de l'espace dans son dos pour le second attaquant. Pour ça, il faut que celui qui décroche soit capable de bonifier un ballon souvent difficile, ce qui demande un niveau technique correct (pas le fort de nos avants), ou bien de savoir intelligemment gagner des fautes pour faire remonter le bloc et ne pas perdre le bénéfice de la construction... ce qui demande de s'engager et d'attaquer son ballon : là encore, la base de la base.
L'exécution est évidemment plus compliquée que ça, mais bon sang ce sont des footballeurs professionnels : si le 442 était réservé au FC Barcelone, on jouerait tous au Handball retranchés devant notre but. Les intentions, c'est de créer des supériorités locales (avec des décrochages et des dédoublements pour faire pencher le jeu d'un côté, afin de libérer de l'espace de l'autre). Cela exige de savoir faire une passe dans les pieds, mais surtout de savoir faire les efforts ensemble, et de rester en bloc. Gourcuff insistait sur la distance entre les joueurs pour une raison : à la construction, cela permet de trouver plus facilement un partenaire, et à la perte de balle, cela permet plus facilement de se repositionner et de verrouiller les lignes de passe. Avec Pélissier (comme avec Landreau d'ailleurs), le bloc est inexistant, complètement distendu, parce qu'on envoie des parpaings devant mais qu'on est trop frileux pour faire remonter la ligne défensive. Résultat, on laisse un grand trou au milieu, où on espère que nos gratteurs de ballons pourront magiquement faire la différence, à deux contre trois, voire deux contre quatre ou cinq selon à quelle vitesse l'adversaire nous contre.
Qu'on arrête avec les subtilités des joueurs qui repiquent dans l'axe, des ailiers qui veulent se muer en buteurs, et autres choses du genre qui sont clairement hors de portée pour le moment. Des passes simples et propres, des débordements ou des dédoublements, ces centres appuyés et précis pour nos avants... voilà déjà de quoi espérer produire un fond de jeu. Consigne pour y parvenir : interdiction de jouer long pour Gravillon, Laporte, Abergel, Lemoine et Chalobah. Peu importe s'il n'y a pas de joueur libre, on garde le ballon, et on attend que ça se libère devant. Peu importe si Wissa et Laurienté font de grandes courses vers l'avant, on ne les sert pas, et on cherche des joueurs proches qui essaient se libérer du marquage adverse.
On ne gagnera pas tous les matches comme ça, mais au moins on verra autre chose que du football de district.
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